Avant propos

Ce récit essaie de relater le plus fidèlement possible notre voyage au Yunnan en Mars 2011. Tous les jours, j’ai noté sur un carnet mes impressions du moment, ou bien, quand les conditions ne se prêtaient pas à l’écriture, je les notais sur un dictaphone numérique très pratique. J’ai tout mis en forme dès notre retour avec l'aide de Jacky ma femme, car deux souvenirs même défaillants valent mieux qu'un. Cet exercice m’a permis de revivre une deuxième fois le voyage, plus intensément que le visionnage des photos que nous avons pu prendre là-bas.
Je n'ai pas voulu non plus faire un reportage style Geo ou un nouvel article wilkipedia. Il y a des gens qui le font beaucoup mieux. Pour en savoir plus sur le Yunnan reportez vous aux bons ouvrages qui lui sont consacrés.
Je ne sais pas si je serai à la hauteur de mon fils Matthias dont les récits de voyage sont remplis d'humour!
Voici d'ailleurs le site de ses récits de voyage:
http://auxyeuxdusouvenir.blogspot.com/

Prologue

Suite à notre magnifique voyage Moscou Pékin via le transsibérien fin Mai 2010 (http://les-jullien.blogspot.com/) et dans l’enthousiasme qui nous caractérise, nous projetions dès notre retour de faire avec Vincent d’Espace Est Ouest (http://www.espace-est-ouest.com/fr/) la route de la soie en Novembre 2011. C’est avec ce dernier que nous avions effectué le voyage en transsibérien. Dès le mois de Juillet de cette même année nous réservons nos places et décidons de nous mettre illico à l’étude du chinois mandarin pour rendre ces 18 mois d’attente plus faciles.
Nous avons contacté des associations franco chinoises pour essayer d’avoir des cours. Hélas ces derniers se passent à Aix en Provence et sont assez onéreux. Habitant à 50Km de là, nous renonçons à cette solution et nous rabattons sur des méthodes gratuites, ou presque, sur Internet. Nous avons commencé par le langage qui semble plus abordable que l'écriture avec ses sinogrammes.
Dieu (pardon Bouddha) que c'est difficile d'apprendre face à un ordinateur! Le Chinois mandarin dispose de 4 tons qu'il faut vraiment maitriser .Deux mots  (voire plus) complètement différents mais écrits de la même façon en Pinyin ne se différencient que par l'intonation qu'on y met.
Le  Pinyin inventé sous Mao est une traduction en alphabet des sinogrammes. Il n'est en aucun cas utilisé dans l'écriture.Lorsqu'on parle de cette dernière on a l'habitude de parler d'idéogrammes mais il y a des formes plus compliquées qu'on appelle sinogrammes.
Nous avons peiné tout l'été pour une faible résultat. Je sais maintenant prononcer et reconnaître les chiffres et quelques formules de politesse.
Heureusement que la date de départ est éloignée car elle nous permet de revenir à la raison. Ce voyage est hors de portée de notre bourse. A contre cœur nous informons Vincent de notre désistement à la fin du mois de Septembre  2010.
Nous sommes tristes et n’avons plus la foi pour continuer notre apprentissage du mandarin.
Il nous reste une petite consolation : Vincent organise pour le vieux nouvel an russe une réunion de tous les gens qui ont voyagé avec lui en Suisse près de Lausanne.
Le vieux nouvel an russe, calendrier JULIEN oblige, a lieu vers le 15 Janvier 2011. Cette réunion très informelle permet aux voyageurs de partager leurs expériences autour d’un plat de nouilles chinoises. Nous décidons de nous y inscrire.
Au mois de Novembre nous passons une semaine à Paris où habite notre fils. Nous lui laissons notre appareil photo car lui et son amie Magda ont décidé de passer les vacances de Noël en Éthiopie.
En rentrant le 23 nous trouvons un mail de Vincent nous faisant part de son intention d’organiser un voyage ouvreur au Yunnan avec 4 VCE (voyageurs Curieux et Enthousiastes) du 11 au 26 Mars 2011.
Un voyage ouvreur consiste à reconnaître sur place un itinéraire, des lieux de visite, des hôtels et des chambres d’hôtes qu’il a sélectionnés lui-même à partir de tous les moyens d’information possibles (livres de voyage, Internet, etc.). Bien entendu, fidèle à son esprit, ce voyage doit être hors des sentiers battus proposés par tous les autres voyagistes. Les VCE  lui sont nécessaires pour valider ou infirmer ses choix car ce sont des personnes de ce type qui feront le même voyage plus tard. Le nombre de VCE limité à 4 permet une grande souplesse dans les déplacements.
Le voyage à prix coûtant comprend les billets d’avion, les frais d‘hébergement les transports sur place et les guides locaux. Restera à notre charge la nourriture , les pourboires guide et chauffeur plus quelques extra éventuels.
Nous décidons immédiatement de nous porter candidats. La réponse de Vincent est presque immédiate. On est sélectionné avec Brigitte sa mère, Annie une VCE qui a déjà fait le transsibérien et la route de la soie. Il y aura donc pour ce voyage Vincent et Andrey d’Espace Est-Ouest et les 4 VCE sélectionnés.
Le voyage est prévu du 11 au 26 Mars 2011.

Les préparatifs

Voilà c’est parti. Un peu plus de 3 mois à patienter. On essaie de grappiller sur Internet des informations sur le Yunnan.
Le Yunnan est une province du sud ouest de la Chine, presque aussi grande que la France, frontalière avec le Laos, le Vietnam et la Malaisie et accolée au nord ouest à la province du Tibet.

A bien y réfléchir cette carte est tendancieuse car elle mentionne la province du Tibet comme un état, au même titre que la Birmanie ou le Laos mais ne mentionne pas les autres provinces chinoises jouxtant le Yunnan au nord et à l'est.
Vincent nous communique un projet de parcours. Pour résumer nous atterrissons à Kunming la capitale. Nous partons ensuite dans l'est de la province (Bamei, Puzhehei). Ne cherchez pas ces noms sur une carte, vous risquez de ne pas les trouver. Après une visite à Jianshui, cap au sud pour admirer les rizières près de Yanyang. Retour à Kunming après un bref passage à Jianshui de nouveau. Train de nuit pour Dali et visite de la région. Ensuite cap au nord LiJiang . Après une visite aux gorges du Yang Tse dites gorges du saut du tigre, direction Shangri-la (anciennement Zhongdian) tout proche du Tibet. Retour par avion à Kunming, puis Canton, puis Paris.
Lorsque nous annonçons la nouvelle à notre fils, il n’est pas plus surpris que ça. Il pourra même lors de sa prochaine visite en Février nous ramener le guide bleu du sud ouest de la Chine car un copain à lui ,comme par hasard, a visité le Yunnan l’année dernière.
En attendant, économies obligent,  nous décidons de passer la période de Noël le plus sobrement possible.
Il nous faut d’abord préparer notre voyage du vieux nouvel an. Un cousin de mon beau frère habite très près du lieu de rassemblement. Bien que l’on ne se soit vu que deux fois en 40 ans, Georges, c'est son nom, se propose avec gentillesse de nous héberger à cette période là.
Il nous envoie même sa vignette de péage pour les autoroutes suisses.
Nous restons bien tranquilles en comptant les jours jusqu’au 15 Janvier 2011. Le voyage en Éthiopie de nos petits est un fiasco complet. A cause de la débâcle bien connue de l’aéroport de Roissy à Noël,  ils ne décolleront que le lendemain et termineront leur voyage à Istanbul faute de correspondance pour Addis-Abeba. Pourvu que notre voyage se passe mieux !
Juste avant de partir en Suisse nous apportons nos demandes de Visas à « Atout Visa » dont nous avions apprécié les prestations pour le Transsibérien. Nous devrions les récupérer dans une semaine. Cela nous fait une occasion d'aller à Marseille où je ne sais pas pourquoi (la circulation peut être) nous ne mettons pratiquement plus les pieds.

Le vieux nouvel an

Il fait très beau ce 14 Janvier 2011 lorsque nous prenons la voiture direction la Suisse. Cela commence bien, elle ne veut pas démarrer. La loose comme dirait Matthias. Notre garagiste nous installe une batterie neuve et nous voilà partis pour de bon, sous un soleil radieux et un printemps très doux.
Il fait aussi beau lorsque nous arrivons à Etoy où habitent Georges et Patricia sa femme. Ils nous accueillent très chaleureusement. Leur maison à flanc de coteaux donne sur le lac Léman. Nous avons été surpris de voir autant de vigne dans cette région.  Ce qui m'a le plus étonné c'est la visite de l'abri anti atomique. J'en avais déjà entendu parler mais là cela dépasse ce que je pouvais imaginer. Jusqu'à une époque très récente  toute habitation ou paire d’habitations pour les villas isolées devait avoir son propre abri.  Celui-ci est situé à la cave. Le blindage de la porte  et de la fenêtre est impressionnant. Il y a un régénérateur d'air à manivelle. Tous les ans un inspecteur vient vérifier que le lieu est conforme et n'est pas utilisé comme cave ou débarras, ce qui est ici le cas. Mais en cas de problème nucléaire qui ira engueuler ce pauvre inspecteur! Au repas du soir que Georges a préparé, risotto, nous buvons un bon vin du terroir. Après une soirée très agréable à discuter et écouter les tubes de notre jeunesses comme Cat Stevens ou Jimmy Endrix, nous allons nous coucher en regardant le lac de la fenêtre. Les deux chats de la maison, pourtant réputés farouches nous ont adoptés immédiatement.
Le lendemain matin, bien qu'il ait gelé dans la nuit, il fait toujours aussi beau et la température monte vite. Au petit déjeuner nous avons la chance de voir en coup de vent leur fille Claudia qui fait ses études à Lausanne. Ensuite Georges et Patricia nous guident jusqu’au château de Vufflens situé à 10kms à peine d'Etoy.

Le vieux nouvel an a lieu au pied de ce magnifique château dans la salle communale. Dès notre arrivée, nous rencontrons Annie et Laurent, nos compagnons de voyage dans le transsibérien. Eux aussi ont voulu participer à cet événement. Il fait un temps extraordinaire si bien que Vincent organise un petit apéritif dehors: Vodka et Porto.
Nous sommes surpris du nombre de participants. Une centaine de personnes se sont déplacées jusqu'ici pour simplement témoigner de leur attachement à Vincent. Ce dernier est tout ému. Nous rencontrons là Andrey et Brigitte avec qui nous allons voyager. Ils nous sont tout de suite très sympathiques. Il y a aussi Tsoggi et son mari qui nous avaient accueillis en Mongolie sous la yourte. Le verre de porto ou de vodka bu, nous avons rendez-vous dans la salle des fêtes autour d'un plat de nouilles chinoises suivi d'un choix impressionnant de dessert, chaque invité en ayant emmené un. Nous ce sont des calissons.
L'ambiance est bon enfant, toute la famille de Vincent est là pour servir les invités.
Vincent nous présente une vidéo sur la remontée du fleuve Ienisséi, un de ses nouveaux voyages. Cela donne vraiment envie d'être sur ce bateau.
Pendant le repas, nous discutons avec quelques voyageurs. Une femme âgée nous raconte ses voyages avec Vincent ainsi que son dernier périple en Amérique du sud qu'elle a atteinte après une traversée en cargo depuis l'Allemagne. Elle projette maintenant d'aller à Sainte Hélène car c'est une admiratrice de Napoléon. Sacré bonne femme!
Voilà, il est 15h lorsqu'on quitte Vincent, Andrey et Brigitte. A dans 2 mois à peine!
Sur le chemin du retour, nous allons à Morges au bord du lac Léman. Il y a beaucoup de monde qui flâne pour cette journée printanière.Nous arrivons à trouver une place dans l'immense parking payant. On veut bien payer mais les parcmètres n'acceptent ni les euros ni les cartes bancaires. Tant pis pour eux on reste.
A notre retour, la voiture est toujours là et sans PV.
Nous galérons un peu ensuite pour regagner Etoy. Grâce à l'aide d'un habitant et de son Iphone, on retrouve la maison de Patricia et de Georges. En fait on était arrivé dans le village par une route différente de celle de la vieille .Comme sur l'autre route, il y avait aussi une fontaine, on a tourné aussi à droite et puis on n'a rien reconnu. Les personnes  interrogées ne connaissaient pas le nom de la "rue des prés", un peu éloignée du centre. Nouvelle soirée très agréable après une fondue arrosée d'un bon vin des coteaux d'ici.
Le Lendemain Patricia et Georges nous amènent visiter le Jura. Il n'y a pratiquement plus de neige, les pistes de ski de fond n'existent plus. On est en plein moi de Janvier et on se croirait au printemps. Nous allons rendre visite à James leur fils qui n'habite pas très loin de chez eux. Même s'ils ne nous connaissent pas, l'accueil que nous réserve sa petite famille est chaleureux. Les deux gamins sont adorables. Une dernière soirée avec Georges et Patricia, d'abord autour d'un curry, Georges est un très bon cuisinier, puis en regardant un DVD de Cat Stevens avec un petit récital à la guitare de Georges.
Voilà, on quitte le lendemain nos deux hôtes exquis pour regagner la Provence. Je pense que l'on se reverra pour le prochain vieux nouvel an.

Jeudi 10 Mars: Départ pour Paris

C'est le grand jour, le jour du départ! Notre train pour Paris est à 12H. Il est à peine 9h30 et nous tournons déjà en rond chez nous, valises bouclées depuis la veille. Nous décidons donc de partir à la gare Aix TGV.
1H plus tard, la voiture garée pour 3 semaines, nous essayons de tuer le temps devant un café crème au seul bar de la gare. Cette dernière est dans un état de saleté extrême car les employés chargés de l’enlèvement des ordures sont en grève. A voir les tas d’immondices cela doit faire déjà au moins une semaine que cette grève a commencé. On se croirait presque à Naples !
Bon ça va, le train part à l’heure et arrive gare de Lyon à Paris 3 heures plus tard. Le voyage n’a pas été pénible : pas de téléphoneur (euse) fou et pas de supporters de foot ou de rugby en goguette. J’étais assis près d’une femme qui n’arrêtait pas de tousser. J’espère qu’elle ne m’a pas refilé sa crève !
Magda, l’amie de notre fils Matthias nous accueille très gentiment. Nous discutons de son séjour en Égypte pendant les manifestations contre Moubarak. Les parents de Magda ainsi que sa sœur vivent au Caire et ont été partie prenante de ces manifestations. Mais bon, il faut la laisser travailler un peu ! Elle bosse pour une société d’informatique liée à la téléphonie et a la chance de pouvoir travailler un jour par semaine à domicile. Nous partons donc déambuler sur les quais de la seine. Matthias et Magda viennent nous rejoindre vers 19H et nous allons dîner dans un bistrot sympathique  « le bistrot des augustins »  sur le quai des Augustins où nous mangeons un excellent gratin.
Après avoir fait nos adieux aux enfants, nous partons nous coucher de bonne heure car la journée demain promet d’être difficile :
Départ de Roissy pour Canton à 11H15. Arrivée dans cette ville à 5H Samedi matin. Et oui 12H d’avion et 7H de décalage horaire plus tard ! 7H petites heures d’attente puis départ pour Kunming à 11H45 et arrivée à 14H. Ouf on n’est pas rendu !

Vendredi 11 Mars - un long voyage en avion

Il est 5h30 du matin. Les deux réveils et le téléphone n’auront pas été nécessaires car on se réveille avant. On avale un petit déjeuner frugal (nescafé et galettes du mont St Michel) et une heure après nous prenons le RER pour Roissy que nous atteignons vers 8h30.  Notre vol jusqu’à Canton par la compagnie China Southern Airlines est prévu "On Time".
Cette compagnie fait partie comme Air France du groupe Sky Team. Ce sont donc des employés d’Air France qui procèdent  à l’enregistrement. Nous retrouverons, qu’ils nous disent, nos  bagages directement à Kumming qui est notre destination finale. Les deux heures d’attente passent vite. J’en profite pour m’acheter l’objet dont je rêve depuis longtemps, un coussin gonflable pour bien dormir dans un avion ! On lit le journal Libération devant un café crème. Le journal ne parle pas du tremblement de terre terrible qui vient de secouer le Japon.
On embarque déjà. L’avion ne semble pas plein mais nous nous retrouvons à 3 dans une rangée de 3. Normal me direz-vous. Non car les rangées de 5 du milieu ne sont occupées chacune que par une seule personne ainsi que pas mal de rangées comme la nôtre. Nous demandons en vain à ces occupants égoïstes de nous céder une place. Il n’en est pas question. Tous, jeunes ou vieux, occidentaux ou chinois refusent, chacun ayant un bon prétexte : Je suis malade, je ne peux dormir qu’allongé, je vous emmerde, etc.
Une fois le décollage terminé, Jacky décide de s’installer au bord d’une de ces fameuses rangées de 5 places occupée seulement par un chinois. Celui-ci ne semble pas content de son audace. Il commence par tousser et cracher pour lui faire comprendre le danger qui la guette. Elle n’en tient pas compte. Il décide alors de s’allonger et pose carrément sa tête sur les genoux de Jacky. Elle lui enfonce le coussin sur la tête tout en s’excusant poliment. Il change de position et essaie maintenant avec les pieds. Mêmes punition. Le manège durera pendant presque toute la durée du vol avant qu’il ne capitule et n'essaie d’engager avec elle une discussion en anglais.
J’ai essayé de mon côté de parler avec mon voisin. Cela a vite avorté. Il est espagnol d’origine marocaine et ne parle ni français ni anglais. Je me rabat sur le minuscule écran vidéo placé dans le dos du siège de devant. La qualité de l’image est désastreuse. Ceci n’est pas grave car celle des programmes est la même: Un vieil épisode de Nestor Burma détective, un film anglais insignifiant, etc. Les bons films sont réservés à ceux qui voyagent en première classe. J’essaie en vain de dormir muni de mon coussin magique mais les deux petites chinoises derrière moi n’arrêtent pas de donner des coups de pied dans mon siège. Je n’ose pas leur dire quoi que ce soit.
Même les tristes repas proposés par les hôtesses ne parviennent pas à rendre ce vol moins pénible. Jacky a un petit peu dormi et moi pas du tout.


Samedi 12 Mars - Arrivée à Kunming

Heureusement tout a une fin. Nous arrivons à Canton. Le passage au contrôle des passeports et des visas est un peu long. Il y a de nombreuses files pour les chinois et une seule pour les étrangers. Je serais prompt à m’insurger mentalement si je ne me rappelais soudainement que chez nous c’est exactement la même chose mais inversée. Au bout d’un moment tous les chinois sont passés. Les contrôleurs décident alors d’ouvrir leurs guichets au reste du monde. A partir de ce moment là tout va vite. Ceci dit, on n’était pas vraiment à la bourre. Il nous reste 6 heures d’attente. On commence par changer nos quelques dollars en Yuans (environ 350 yuans pour 55$). Nous nous dirigeons ensuite vers notre terminal d’embarquement pour Kunming.
L’aéroport de Canton est immense et très moderne.
C’est en fait le Hub de la compagnie China Southern Airlines qui dessert d’ici toutes les destinations domestiques et Dieu (pardon Confucius) sait qu’il y en a. Le trajet est long. Quelques chauffeurs de voitures électriques nous proposent de nous emmener. Je ne sais pas pourquoi on refuse. Nous nous arrêtons dans un bar pour boire un café crème. Ce dernier n’est pas mauvais mais Confucius qu’il est cher! A 55 yuans soit 7€ on se croirait au boulevard Saint Michel ou sur le Cours Mirabeau ou à l’aéroport de Pékin !
On traîne maintenant depuis 3 heures et il y a encore 3 heures à tirer avant d’embarquer. Les gens sont de plus en plus nombreux. Peut-être parce que c’est le début du week-end. Les boutiques sont les mêmes que dans nos aéroports : vêtements de luxe, cadeaux,etc. Il y a de grands halls avec des palmiers immenses et toutes sortes de plantes tropicales. A y voir de près ce sont toutes des plantes en plastique. Ivres de sommeil nous essayons de dormir sur des chaises dans un des nombreux halls d’attente. Tout va bien, il n’y a pas beaucoup de monde. Aussitôt cette réflexion faite, un groupe d’une vingtaine de chinois, tous munis d’une casquette jaune s’installe à côté de nous et se met à discuter joyeusement. La langue chinoise est telle qu’on a l’impression que les gens s’invectivent alors qu’il n’en est rien. L’italien a côté est un silencieux! On se réfugie dans un autre hall mais c’est pareil à part la couleur des casquettes près.
Lorsque nous finissons par embarquer, nous somme complètement exténués. L’avion part à l’heure et arrive 2 heures et un repas insipide plus tard à Kumming, en avance sur l’horaire.Je ne sais si c'est parce que la ville est à 2000m d'altitude, mais l'approche s'est faite au milieu de turbulences impressionnantes.
Le timing a été bien calculé par Vincent. Nous arrivons les premiers vers 14H. Annie arrive 40 minutes plus tard en provenance de Hong Kong, Vincent , Andrey et Brigitte une heure après en provenance de Pékin. Yang notre guide locale sera là pour accueillir tout ce beau monde. 
Le débarquement se fait rapidement. Le hall des arrivées ressemble à celui d’un petit aéroport de province. Pourtant Kunming compte 5 millions d’habitants. Nous nous dirigeons vers le « bagage claim » pour récupérer nos valises que nous ne récupérons pas, pour la bonne raison qu’elles manquent  l’appel. Nous allons fissa vers le service des réclamations. L’affaire est délicate. L’employée dans un anglais approximatif nous dit que l’on aurait dû récupérer nos bagages à Canton pour le dédouanement, contrairement à ce qu’on nous avait assuré à Paris. On lui donne les renseignements qu’elle nous demande (numéro de vol, de visa, etc.). Une fois qu’elle a ce qu’elle veut, elle me demande de remplir un autre papier avec tous les renseignements que je viens de lui donner. Peut être une vengeance ! En tout cas on croit comprendre, mais ce n’est pas sûr, qu’il va falloir revenir ce soir pour récupérer nos valises qui seront sur le prochain vol en provenance de Canton. Tout ce cirque dure à peu près une heure. Il y a peu de chance que notre guide soit encore à la sortie à nous attendre. Heureusement Vincent nous avait donné le numéro de portable de celle-ci. C’est le moment ou jamais de tester si ma mobicarte me permet de téléphoner en Chine. L’appel passe puis au moment où quelqu’un semble vouloir répondre la communication est coupée. N’ayant plus rien à attendre du bureau des pleurs nous sortons. Évidemment il n’y a personne pour nous attendre avec une pancarte du style « Bienvenue Jacky et Robert ». Je tente un nouvel appel et là, au miracle, notre guide Yang me répond. Ne nous ayant pas vu elle est partie attendre Annie en provenance de Hong Kong. Nous les retrouvons toutes les deux quelques minutes plus tard. Notre guide toute menue parle très bien le Français. Annie nous est tout de suite sympathique. Pendant qu’elle et Jacky essaient de changer des euros en yuans, je retourne avec Yang au bureau des valises perdues. Heureusement qu’elle est là, car il est quasiment impossible pour un pékin ordinaire de rentrer dans l’aéroport par le hall des sorties ! Nous retrouvons notre employée et Yang lui signifie qu’elle viendra elle-même chercher nos valises à 22h ce soir. Ceci étant réglé, nous rejoignons Annie et Jacky et il ne nous reste plus qu’à attendre l’arrivée de Vincent, Andrey et Brigitte. 
Pendant ce temps nous faisons un peu plus connaissance avec Yang. Elle a étudié pendant deux ans l’économie du tourisme à Aix en Provence. Elle est très heureuse de se remémorer avec nous les hauts lieux de cette ville : Cours Mirabeau, fontaine des 4 dauphins, etc.
Une demie heure plus tard nous voilà enfin tous au complet. On s’engouffre dans notre minibus de 17 places. Pour 6 personnes plus la guide, c’est plus confortable que l’avion ! En route pour L’hôtel « Green Lake » de Kunming. C'est un très bel hôtel de luxe entouré d’un parc magnifique.


Nous devons effectuer un véritable test psychotechnique pour prendre l’ascenseur. Comme  tous les quidam ne sont pas autorisés à l’emprunter,il faut montrer patte blanche, ce qui consiste à positionner la carte magnétique, que l’on nous a fournie à l’accueil et qui tient lieu de clé pour la chambre, devant une cellule photoélectrique située à côté des boutons de sélection de l’étage. Comme il n’y a aucun mode d’emploi, même en chinois, l’ascenseur refuse d’obtempérer. Heureusement arrive Vincent à qui rien n’est inconnu. La chambre que l’on parvient à ouvrir sans problème est immense mais sombre. Il faut en fait insérer la clerte (croisement moderne d’une clé avec une carte magnétique) dans une encoche dédiée située près de la porte d’entrée. Il faudrait que l’on sorte plus souvent de notre trou pour ne pas être dépassé par la technique. Il y a carrément un poste de télévision dans la baignoire ! Le temps de se changer, nous nous retrouvons dans le hall d’entrée pour aller en taxi au restaurant " Laofangzi " situé dans une très belle résidence traditionnelle chinoise des vieux quartiers de Kunming. Sur le chemin, nous faisons une halte devant une grande banque pour récupérer suffisamment de yuans afin de tenir une semaine car nous n’aurons peut être pas d’autres opportunités de trouver un autre distributeur de billets d’ici notre retour à Kunming.
Le bruit de la ville est infernal. Les gens klaxonnent pour un oui pour un non. De plus c’est la banque de Chine et c’est l’heure à laquelle les convoyeurs de fonds viennent déposer leur argent. Ils se succèdent à un rythme effréné en faisant hurler leur sirène.
Nous rejoignons à pied le restaurant  Laofangzi. Il y a une cour intérieure surplombée par des terrasses où sont situées les salles à manger.
  Dans la cour se trouve un bassin rempli de crapauds énormes prêts à être livrés au cuisinier sur une simple demande du client.
Personne d’entre nous ne mangera du crapaud ce soir. Nous nous installons au premier étage dans une des petites salles autour d’une grande table ronde au centre de laquelle se trouve un plateau tournant. C’est Yang qui choisi notre premier vrai menu chinois. Le résultat est tout simplement délicieux et pour un prix somme toute modique, seulement 270 Yuans (35 €) pour 7 personnes. 
Après ce délicieux repas, Yang nous emmène voir un spectacle folklorique présentant les chants et danses des minorités du Yunnan. Pendant que nous assistons au spectacle, elle file à l’aéroport récupérer nos fameuses valises. Le spectacle est charmant mais nous commençons à ressentir les fatigues de notre voyage. Heureusement que certains tableaux sont accompagnés de tambours sinon je me serai endormi ! En comparaison les tambours du Bronx ressemblent à de la musique de chambre.
Je pense que nous aurions du voir ce spectacle plutôt en fin de voyage après avoir croisé effectivement ces différentes minorités. Bien que les artistes y mettent beaucoup de volonté, les thèmes sont parfois un peu pompeux. Il y a tout de même un groupe de jeunes filles représentant des fleurs dont le ballet et les chants sont très réussis.
Il y a beaucoup de minorités en Chine, surtout dans les provinces du sud ouest comme le Yunnan. Cependant ces minorités ne font pas le poids face au Han qui sont plus de 1 milliard. La minorité la plus importante, la minorité Zhuang ne compte que 15 millions de personnes.
Il est 23 heures lorsque nous rentrons à l’hôtel complètement hébétés par la fatigue. Tellement hébétés que j’en ai perdu les seules vrais lunettes que j’avais amenées pour ce voyage. L’étui étant tombé par terre en s’ouvrant, je n’ai pas eu la présence d’esprit de vérifier que les dites lunettes ne s’étaient pas échappées lorsque j’ai récupéré icelui. 
Il nous faut un long moment avant de trouver un taxi car il y a beaucoup de monde qui sort du spectacle et ces derniers ne sont pas nombreux. Ce sont des véhicules étranges. Le siège du chauffeur est protégé par une armature métallique.
Heureusement une bonne nouvelle : nos valises nous attendent dans la chambre. Après une bonne douche nous nous enfonçons dans notre grand lit et nous endormons aussitôt.
Demain départ pour Bamei de bonne heure.
Bamei  est un village de la minorité Zhuang à l’est du Yunnan,  pratiquement à la frontière du Guangxi, dans la préfecture de Guangnan. Sa particularité est d’être situé dans un cirque  de montagne et de n’être accessible que par une rivière  souterraine de 1500m de long. Il est très connu des chinois car célébré il y a très  longtemps par un le poète Tao Yuanming dont les vers relatent ce paradis caché rempli de pêchers en fleur.








Dimanche 13 Mars - Direction Bamei

Nous nous levons à la bourre car, contrairement à mon habitude et sûrement à cause de la fatigue, je ne me suis pas réveillé tout seul. Nous avons juste le temps de prendre un petit déjeuner copieux avant de nous engouffrer dans le minibus. 
Vincent nous annonce que le tremblement de terre au Japon a été suivi d'un tsunami gigantesque qui a fait au moins 20 000 morts et pire que cela a provoqué l'explosion de 3 réacteurs dans une centrale nucléaire. Il a pu glaner ces informations grâce à son I phone. La censure est telle sur Internet qu'il n'a accès qu'à certaines nouvelles brèves d'agence de presse. Impossible d'avoir un accès approfondi  à des journaux en ligne comme le Monde. D'ailleurs les journaux occidentaux sont absents des kiosques même à Pékin.
Il nous apprend aussi que l'OTAN, la France en tête commence à bombarder les positions de Kadafi en Libye.
La nuit a été profitable. Le temps est doux. Nous sommes en forme bien que Jacky tousse beaucoup. Sûrement un problème d’allergie.
Et voilà c’est parti pour un long périple. Sur la route un panneau de propagande qui fait l’éloge des minorités : « Union entre les minorités pour une civilisation stable »
Le paysage est verdoyant et les arbres fruitiers sont en fleur. Nous sommes confrontés tout à coup à un embouteillage énorme. Il y a un contrôle de police sur la route et nous découvrons une particularité de la conduite chinoise : 
Plutôt que d’attendre patiemment son tour pour passer, chacun crée une file supplémentaire sur la gauche dans l’espoir de doubler et de gagner quelques mètres. Comme ceux d’en face font de même, la situation devient vite inextricable. Nous retrouverons bien souvent ce comportement idiot!

Pendant ce temps là, Yang qui se souvient de sa jeunesse communiste essaie de lancer Andrey dans un duo de chansons soviétiques, pardon russes.
Souvent celui-ci a du mal à reconnaître la mélodie car elle a été arrangée à la sauce chinoise. Lorsqu’il y réussit, il reprend la ritournelle au grand ravissement de Yang.
Finalement le bouchon se résorbe et nous continuons notre périple au milieu des rizières, des champs de vigne, de blé et de mais. Comme nous sommes en milieu tropical, il y a deux récoltes par an. Nous voyons nos premiers buffles dans les champs.
Vers midi nous nous arrêtons dans un restaurant au bord de la route. Comme hier, c’est Yang qui choisit le menu en prenant soin que la cuisine ne soit pas trop épicée comme l’aime les chinois. L’endroit est bondé et bruyant mais la cuisine excellente. Beaucoup de légumes. 
Parvenu à ce point du récit, il faut que je vous fasse part de quelques particularités de la Chine afin que les personnes délicates ne soient pas prises au dépourvu si elles veulent entreprendre un voyage dans ce pays.
  • Mis à par les grands hôtels ou restaurants, les toilettes sont assez rudimentaires. Les plus évoluées consistent en une suite de box sans portes munis de toilettes à la turque. Les plus sommaires consistent en une rigole chargée de tout collecter où les gens font leur besoin à la queue leu leu. Les chinois ne sont pas gênés par ce manque d’intimité. Comme dirait Vincent, c’est assez sain car il n’y a pas de contact avec les poignées de porte ou la cuvette !
  • La vaisselle des restaurants, sauf ceux fréquentés par les touristes est lavée dans une petite bassine. Le résultat final quant à la propreté est approximatif mais il suffit de nettoyer négligemment l’assiette avec une serviette avant de s’en servir.
  • Il n’y a aucun plat préparé à l’avance. Tous les légumes disponibles sont sur un présentoir à l’entrée du restaurant. On donne son choix au cuisinier et celui-ci découpe les légumes sélectionnés et les cuisine rapidement dans un wok. Ce système élimine beaucoup de problèmes liés à l’hygiène dans la préparation culinaire.
  • Il n’y a pas de dessert dans les restaurants chinois.
Un exemple de toilettes publiques:
Un exemple de présentation de légumes:
Un exemple de vaisselle :
En sortant du restaurant nous achetons des mandarines excellentes à une paysanne installée au bord de la route et nous voilà repartis  au milieu des champs de colza, de choux, de kapokiers arborant de magnifiques fleurs rouges! Nous empruntons pour quelques kilomètres une autoroute ultramoderne. Au péage de sortie, un bufflon broute le peu d’herbe qu’il peut trouver et un homme déambule avec un serpent vivant dans les bras. Commence alors une route sinueuse bordée de pêchers en fleur. Plus loin nous traversons une forêt de pin et d'eucalyptus tous plus déplumés les uns que les autres. Brigitte émet l’hypothèse que les feuilles ou les aiguilles sont utilisées pour le chauffage ou tout au moins la cuisine.
Ces longs trajets sont propices aux discussions et au partage des connaissances. Vincent nous parle de la richesse des sinogrammes qui permettent d’introduire par exemple le nom des enseignes commerciales occidentales. Ainsi l’onomatopée « Carrefour » se traduit par « joie, bonheur de la famille ».
Nous commençons aussi grâce à Brigitte à nous initier à l’Arpitan.
Le franco provençal ou arpitan, qui signifie montagnard ou berger, est une langue romane parlée en France, en Suisse et en Italie. C’est l’une des langues distinctes du groupe linguistique gallo-roman, il présente certains traits communs avec le français et avec l’occitan.
Le premier mot appris est la "pive" qui est en fait la pomme de sapin.
Nous traversons maintenant une vallée encaissée dans laquelle la lumière est magnifique. C’est l’heure ou les paysans rentrent des champs. Il y a beaucoup de charrettes sur la route.
Il est presque 18 heures lorsque nous atteignons Guangnan. Il y a encore des vestiges des décorations de la fête du nouvel an chinois appelée ici fête du printemps.
Contrairement à ce que représente la photo, cette année est l’année du lapin.
Ni Yang ni le chauffeur ne semblent connaître la route à suivre. Après quelques coups de téléphone, nous prenons à bord le chef du village de Bamei qui grâce à la traduction de Yang nous explique la situation. Les habitants du village  se sont révoltés contre le gouverneur car ce dernier les spolie sur les recettes du transport en barque que les touristes doivent emprunter pour se rendre dans le village.  La voie fluviale est donc bloquée et aucun touriste ne peut rejoindre Bamei. Il existe cependant une solution qui consiste à utiliser une piste très peu fréquentée et difficile d’accès. Vincent opte pour cette solution. 30 kms plus loin et après avoir zigzagué entre les buffles qui rentrent au bercail, nous voilà maintenant au village de Fali, à l’entrée de la rivière souterraine qui mène à Bamei. L’eau est d’un vert magnifique. 
On se ballade quelques minutes sur ce débarcadère avec les petites barques de pêcheurs  vides en regrettant de ne pouvoir arriver à Bamei par la rivière.  
De retour vers le parking du village, nous sommes bloqués par un gros camion chargé de canne à sucre. Notre chauffeur est contraint à une marche arrière plus que problématique pour le laisser passer. Sur le parking nous troquons notre bus, trop important pour la taille de la piste, pour un petit minibus de 7 places. On prend chacun quelques affaires pour passer la nuit, qui d’ailleurs est en train de tomber, et on s’y entasse à 10 (nous 6, la guide le chef du village, l’hôte qui va nous héberger pour la nuit et le chauffeur). Yang est très inquiète parce qu’on ne respecte pas les règles de sécurité. Le petit bus commence une longue montée sur une piste un peu défoncée. Arrivés presque au sommet du col nous sommes obligés de descendre afin que le véhicule franchisse une ornière un peu plus profonde que les autres. Une fois l’obstacle franchi, nous commençons une descente pas piquée des vers. Heureusement que la nuit nous empêche de voir les précipices qui bordent sûrement la piste. Pourvu qu’on ne croise pas de véhicule venant en sens inverse !
Enfin au bout d’une demie heure nous arrivons sur la grande place de Bamei. Nous rejoignons à pied la maison de notre hôte où nous attend le repas préparé par sa femme. Le temps étant agréable nous mangeons à l’extérieur. Les légumes sont excellents mais le canard est cuisiné d’une drôle de façon : Il a été découpé en morceaux mis dans un wok avec quelques légumes (os compris) et très peu cuit !
Le repas fini, nous prenons possession de notre chambre rustique mais confortable. J'espère que nous allons bien dormir sous le portrait de Mao.


Lundi 14 Mars - De Bamei à Puzhehei

Le réveil, quoique agréable a été matinal. Vers 4 heures le coq de la maison a commencé son travail. Mais ça va, nous avons bien dormi malgré Mao. Il fait un temps brumeux et doux. Vers 7h , nous buvons notre nescafé amené fort judicieusement de France. La seule boisson proposée par les chinois est du thé vert. L’eau chaude est fournie par un énorme thermos mis à notre disposition par notre hôte la veille. L’eau est encore très chaude car l’ampoule du dit thermos est en verre. Nous n’essayons même pas de prendre la douche froide qui est située au dessus des WC à la turque dans la salle de bain et qui sert en même temps de chasse d’eau.
Nous  sortons découvrir les lieux que nous n’avons pu apprécier lors de notre arrivée nocturne. Notre chambre comme celles de Vincent et Andrey ou celle de Brigitte et Annie donne dans une cour intérieure assez spacieuse.
Yang nous rejoint pour un petit déjeuner très simple puis nous partons visiter le village. Brigitte qui est, comme Andrey ou Annie une acheteuse compulsive a déjà fait l’acquisition d’une branche de bois flotté qu’elle trouve très jolie, ce qui est vrai ma foi.
Sur le balcon d'une maison des gamins magnifiques sont très intéressés par notre présence.

Plus loin nous passons sous un énorme banian aux racines impressionnantes.
Nous sortons bien vite du village par des ruelles étroites en terre battue. Il n’y a vraiment pas de place pour une voiture.
Le paysage de cette vallée entourée de montagne est tel que décrit par le poète, même si je n’ai pas lu ce dernier . Les pêchers sont en fleur et les champs de colza (blanc ou jaune) aussi. Nous sommes les seuls touristes, révolte oblige ! Nous apprécions le calme dans cette nature généreuse.
Au bord du chemin, il y a des tombes orientées comme pour profiter de la vue.
Yang nous dit qu'on choisit pour le mort le meilleur point de vue selon le principe du "Feng Shui" qui veut dire le vent et l'eau. Cet art taoïste millénaire a pour but  d'harmoniser l'énergie environnementale d'un lieu de manière à favoriser la santé, le bien-être et la prospérité de ses occupants, y compris les morts.
Nos pas nous mènent ensuite à la grotte qui sert de débarcadère. Comme à à l'autre extrémité, les barques sont désertes, si ce n’est un couple qui embarque pour la pêche.


Notre hôte nous dit qu'en temps normal, il y a entre 400 et 2000 touristes par jour. Aujourd'hui nous sommes les seuls. Quelle chance!
Nous resterions des jours dans ce lieu édénique comme dirait Annie, mais voyage ouvreur oblige, nous devons continuer notre route. 
Après avoir pris congé de nos hôtes nous regagnons notre minibus. Je dirais plutôt nos minibus car Yang, encore traumatisée par l’expédition de la veille, a préféré que l’on se répartisse dans deux véhicules. Sur la place du village, seul lieu accessible aux engins motorisés, les habitants tiennent une assemblée générale concernant je suppose la suite à donner à leur révolte. Nous empruntons la piste d’hier en sens inverse et en plein jour. Nous avons pendant une demie heure tout loisir d’admirer les précipices qui la bordent et l’habileté des chauffeurs à éviter les ornières ou les pierres. 
Ouf, nous revoilà au village où nous avions laissé notre bus. Il y a aujourd’hui un marché que nous nous empressons de visiter. Les vendeurs de toutes sortes (fruits, poissons chats, poules, habits, pipes à eau) sont installés de chaque côté de la rue. 


Vers 11h l’animation s’arrête, les marchands plient bagage, nous aussi direction  Puzhehei à 20Kms de Quibei, un peu plus au nord que Bamei.
C’est encore un site très prisé par les chinois car au début de l’été les étendues d’eau se parent de milliers de fleurs de nymphéas et de papyrus. Mais bon, au mois de Mars on devrait être tranquille côté foule. Espérons que les paysages soient beaux même sans les fleurs de nénuphars.
Nous revoilà sur la route dans notre minibus.On traverse  un paysage de montagne extraordinaire. Des femmes miao en costume très coloré se rendent aux champs. Les cultures en terrasse sont vertigineuses.
Il est impossible de s'arrêter car la route est étroite. On demande au chauffeur de rouler lentement pour pouvoir prendre des photos. Il fait comme s'il n'avait pas compris. La suite nous confortera dans notre opinion générale: c'est un abruti!
Lors d'un arrêt technique, on essaie d'aller aux toilettes:

Sans hésitation la majorité décide d'utiliser la nature.
Nous nous arrêtons à midi dans un restaurant  très simple mais le repas s'avère délicieux: fèves, champignons, poisson, lotus, haricots blanc pannés.

Vers 17h nous arrivons devant une étendue d'eau avec des collines en pain de sucre rognés par l'érosion. Le paysage ressemble à la baie d'Along au Vietnam.

C'est Puzhehei. Il nous faut payer un droit d'entrée. Le lieu ressemble à un parc d'attraction avec hôtels, restaurants, boutiques de souvenir, karaoké, etc. 
Nous tombons dans le piège est achetons Jacky, Andrey et moi des chapeaux chinois comme ceux que l'on voit dans les rizières. Pour le moment ils nous protègent plus de la pluie que du soleil.
Nous empruntons des barques pour nous rendre au village situé de l'autre côté de l'étendue d'eau. La traversée est agréable. Il y a des pêcheurs près des berges.
Le village est un village typique de la communauté Yi avec une maison d'hôte que nous visitons car Vincent veut la mettre dans son futur programme. Elle est certes rustique mais très accueillante. Hélas nous ne dormirons pas là mais dans le parc de loisir où nous retournons. Il commence à pleuvoir. Notre hôtel est de style soviétique, c'est à dire sans charme mais au moins les WC et la douche sont corrects. Notre vue se limite à une vague cour intérieure très étroite.
Nous trouvons pour dîner un restaurant Ouigour c'est à dire musulman. La viande proposée est à l'étal à l'intérieur.



Le menu est moyen: soupe à la menthe et à l’œuf, nouilles frites et aubergines. Il y a eu mieux!
Il est maintenant l'heure d'aller dormir, avec des boules quies pour moi car le karaoké d'à côté nous la joue plein pot.








Mardi 15 Mars: de Puzhehei à Jianshui

Il pleut ce matin. L'air est un peu frisquet mais cela ne nous empêche pas de prendre notre petit déjeuner au bord de l'eau.
Le retour à l'hôtel est catastrophique pour Brigitte qui glisse en faisant le grand écart dans le couloir. Ces ahuris avaient laissé les fenêtres ouvertes malgré la pluie. Faut croire que les chinois ne glissent pas sur un sol mouillé.
Elle souffre beaucoup et a du mal à se relever. Il lui faudra une bonne heure avant de faire un mouvement. Elle regagne péniblement le minibus avec l'aide de Vincent. Il s'avèrera après examen à son retour en Suisse qu'elle avait une double déchirure des ligaments au niveau des cuisses. Nous reprenons la route direction Jianshui. La pluie a rafraichi l'atmosphère. Il ne fait pas chaud dans le bus et cela nécessite un peu de chauffage. Je ne comprend pas que le chauffeur klaxonne chaque fois qu'il double un véhicule.
Vincent à acheté un gros thermos comme celui de la maison d'hôte de Bamei, ainsi que des tasses en plastique. Lorsque le chauffeur s'arrête prendre du carburant, nous nous offrons thé, nescafé ou cappuccino qu'Annie a emmené dans ses bagages avec quelques petits gâteaux. Nous offrons des calissons à Yang qui en est toute émue. C'est un peu sa madeleine si j'ose dire.
Nous rejoignons la grande route de Kunming à Jianshui. Il y a énormément de camions dans les deux sens, c'est assez effrayant!
Ouf, un arrêt restaurant dans un cadre très agréable au bord de l'eau.
Chaque porte donne accès à une salle avec la traditionnelle table ronde au plateau tournant. Nous avons droit à la plus éloignée de l'entrée mais Yang apitoie le gérant sur le sort de Brigitte et nous gagnons la plus proche. Parmi les nombreux plats, pieds de porc au caramel. Je crois me souvenir que seuls Andrey et moi y avons goûté et les avons trouvés délicieux.
Nous reprenons la route. Nos pas, pardons nos pneus, nous mènent à un village Miao que nous visitons sous la pluie. Andrey se fait copain avec tous les chiens, fort laids au demeurant, qui le suivent en remuant la queue. Nous passons devant une école. C'est la récréation et les enfants qui sont dans la cour veulent sortir nous voir, tellement on excite leur curiosité. L'instituteur refuse un petit moment puis leur ouvre la porte pour qu'ils puissent nous approcher.

Nous continuons notre ballade sous la pluie et arrivons devant la cour d'une maison de brique assez pauvre où une dame âgée nous invite à entrer. Elle se fait un plaisir de se laisser photographier devant la porte de sa maison. Au dessus de la dite porte se trouve un curieux "chasse mauvais sort". Un miroir et une paire de ciseaux.
L'ancêtre porte le chapeau traditionnel et de magnifiques guêtres brodées. Sa petite fille arrive quelques instants plus tard, elle porte dans le dos un bébé installé dans un splendide porte bébé .
Elle est suivie par son autre enfant, une petite fille. Contrairement aux chinois Han, les Miao peuvent avoir deux enfants. La jeune maman nous dit avoir 22 ans. Comme nous la complimentons sur la beauté de son porte bébé, elle entre dans sa maison et en ressort prestement en nous proposant à la vente plusieurs de ces derniers. Brigitte et Annie en achètent chacune un. La petite fille a revêtu le chapeau de fête de sa mère.
La grand mère nous invite ensuite à visiter sa maison. Les pièces sont sombres car il n'y a pas de fenêtre. La cuisine est un véritable capharnaüm. 
Elle est séparée de la chambre par des rideaux en plastique aux couleurs criardes, sûrement pour mettre un peu de lumière.
La fille de l'ancêtre et donc la mère de la jeune maman nous a rejoint. On a devant nous 4 générations de Miao. Nous leur achetons des petites sacoches ou aumônières brodées. Nous les quittons très contentes.
Le village est vraiment pauvre et les rues boueuses, la pluie n'arrange rien. Bizarrement, il y a une grande maison bleue moderne qui surplombe les humbles masures. Yang nous dit que ce sont des villageois qui l'on faite bâtir avec l'argent qu'ils ont récupéré en compensation de leur fils mort dans un accident de travail je crois. Triste privilège!
Nous reprenons la route pour Jianshui. Dans la banlieue nous traversons les quartiers musulmans avec les enseignes écrites en arabe. Cela fait drôle après des centaines de panneaux chinois. Il y a plusieurs mosquées modernes et gigantesques avec au moins 4 minarets chacune. A côté la mosquée de Paris ressemble à une chapelle.
Nous arrivons à notre hôtel dans la vieille ville. Il est très agréable et très confortable.
Le temps de poser nos valises, nous allons visiter sous la pluie les jardins de la famille Zhu quelques mètres plus loin.
Il fait de plus en plus frais. Yang nous dit qu'il a neigé à Kunming hier soir.
La famille Zhu a acquis sa fortune, à la fin du XIX siècle , sous la dynastie Qing dans l'exploitation de mines d'étain  et le négoce. Ils ont fait bâtir pour montrer leur puissance une demeure de près de 2 hectares comprenant 40 cours intérieures, des pavillons et des jardins. Ayant choisi le mauvais camp de la contre révolution vers1911, ils ont été chassés. Après avoir servi entre autre de garnison, l'ensemble a été restauré pour devenir un musée. Une partie a été aménagée en hôtel. Chaque patio possède un arrangement différent de plantes. Il y a le patio des marguerites, celui des bambous, etc. Les arbres sont torturés à la chinoise pour avoir des formes très particulières.
Les portes et les murs des habitations sont décorés de sinogrammes associés à des peintures qui sont magnifiques.

Les sièges des fauteuils sont en marbre noir et blanc.
La visite des jardins s'achève. Nous déambulons sous la pluie dans les rues de Janshui. 
Il fait carrément froid et nous nous réfugions au chaud dans une boutique de "China Mobil" où Annie essaie d'acheter, avec l'aide de Yang, une carte de téléphone pour son portable afin de pouvoir téléphoner à sa famille à Shangai. On gagne comme ça une demie heure puis nous continuons courageusement notre périple jusqu'à la porte Est des remparts de la ville. C'est la seule des 4 portes qui est d'époque (je ne me souviens pas laquelle). Elle est en réfection.
Il est temps d'aller manger. Yang a trouvé un restaurant près de l'hôtel, car Brigitte a du mal à marcher. Encore une fois le repas est varié, très goûteux, et peu cher (300 yuans pour 7 personnes)
Après ça, une bonne douche et au lit.